Aller au contenu

Page:Eliot - Daniel Deronda vol 2&3.djvu/328

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


LXI


Que l’on s’imagine la différence de l’état d’esprit de Deronda quand il quitta l’Angleterre et quand il y retourna. Il était parti pour Gênes absolument incertain si le penchant de ses désirs et de ses affections serait encouragé, si les choses qui lui seraient révélées pourraient le conduire par de nouveaux chemins. Il revenait nanti d’une charte qui lui garantissait le droit d’héritage que son ambition demandait ; il revenait avec ce qui était meilleur encore que la liberté : un lien respectueux qu’il était prêt à accepter avec joie, même s’il n’avait pas été accompagné par l’espérance de satisfaire une passion secrète, à laquelle, jusqu’ici, il n’avait pas permis de grandir. Mais, maintenant, il osait s’avouer son amour à lui-même. Le feu de la jalousie s’était allumé quand il avait entendu les prétentions de Hans, et lorsque sa mère le soupçonna d’aimer une juive, toute réponse évasive lui aurait fait l’effet d’une infidélité. Il s’était vu contraint d’avouer son amour, comme Joseph Kalonymos l’avait contraint d’exprimer définitivement sa résolution. Désormais, il lui lardait d’être auprès de Mordecai, de mani-