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Page:Eliot - Middlemarch, volume 2.djvu/118

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qui éclairait en arrière le souvenir ce son aurore le péché lui paraissait être une question de doctrine et de pénitence intérieure, l’humiliation une pratique réservée au secret du cabinet, la portée de ses actions une matière d’ordre privé, dont l’appréciation se déterminait uniquement par les relations avec le ciel et par la conception des intentions divines. Et maintenant, comme par quelque hideuse magie, cette apparition rouge et bruyante s’était levée devant lui dans une inébranlable réalité, — incarnation du passé qui n’était pas entrée dans l’idée qu’il s’était faite des châtiments. Mais M. Bulstrode savait prendre vite un parti.

— Je rentrais chez moi, dit-il, mais je puis retarder un peu ma course. Et vous pouvez, si vous le voulez, rester ici.

— Merci, fit Raffles avec une grimace. Je ne me soucie pas de voir mon beau-fils. J’aimerais mieux rentrer avec vous.

— Votre beau-fils, s’il s’agit de M. Rigg Featherstone, n’est plus ici. C’est moi qui suis le maître en ces lieux.

Raffles ouvrit de grands yeux et fit entendre un long sifflement de surprise avant de répondre.

— C’est bien, alors, je n’ai pas d’objection. J’ai eu assez à marcher depuis la grande route. Je n’ai jamais été grand marcheur, ni grand cavalier non plus. Ce que j’aime, c’est un élégant véhicule, bien attelé d’un cob vigoureux. Quelle agréable surprise ce doit être pour vous de me revoir, vieux camarade ! continua-t-il tandis qu’ils se dirigeaient vers la maison.

M. Raffles semblait jouir grandement de son propre esprit, et lançait ses jambes d’un air crâne qui dépassait un peu la judicieuse patience de son compagnon.

— Si je me souviens bien, observa M. Bulstrode avec une colère glacée, notre connaissance, il y a bien des années, n’avait pas l’espèce d’intimité que vous affectez en ce moment, monsieur Raffles. Quelque service que vous me