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Page:Eliot - Middlemarch, volume 2.djvu/326

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— En effet, dit Caleb. Mais c’est absolument arrêté. Il faut que j’y renonce.

Il parlait avec une fermeté très douce, et il s’apercevait toutefois que Bulstrode semblait comme se rapetisser devant cette douceur, son visage paraissant se rétrécir et ses yeux se détournant du regard qui s’arrêtait sur lui. Caleb ressentit une profonde pitié, mais il lui eût été impossible d’invoquer des prétextes pour expliquer sa résolution, de quelque utilité que cela eût pu être pour lui.

— Vous avez été amené à cela, je présume, par quelques calomnies sur mon compte, proférées par ce malheureux, dit Bulstrode, anxieux maintenant de connaître le pire.

— C’est vrai. Je ne puis nier que j’agisse d’après ce que je lui ai entendu dire.

— Vous êtes un homme consciencieux, monsieur Garth, un homme, j’en suis certain, qui se sent responsable devant Dieu. Vous ne voudriez pas me faire tort, en vous hâtant d’ajouter foi à une calomnie, reprit Bulstrode, cherchant les moyens de justification les mieux appropriés au caractère de son interlocuteur. C’est une pauvre raison pour renoncer à une association qui, je crois pouvoir l’affirmer, sera mutuellement avantageuse.

— Je ne voudrais faire tort à personne, en tant qu’il dépend de moi, dit Caleb, quand même je croirais avoir Dieu avec moi. Je ne me crois pas dénué de pitié pour mon semblable. Mais, monsieur, je ne puis faire autrement que de croire vrai ce que m’a dit Raffles. Et je sens que je ne puis être heureux en travaillant avec vous ou en tirant profit de vous. Cela blesse ma conscience. Il faut donc que je vous prie de chercher un autre agent.

— Très bien, monsieur Garth. Au moins, veuillez me dire le pire que vous ayez appris. Il faut que je sache quel est l’infâme propos dont je suis exposé à être la victime, dit Bulstrode, tandis qu’une certaine colère commençait à se