Page:Eliot - Middlemarch, volume 2.djvu/332

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— Cela ne me paraît pas nécessaire, dit Lydgate. Le malade me semble pour le moment assez docile et retenu par la crainte. Il pourrait devenir moins traitable. Mais vous avez un homme dans la maison, n’est-ce pas ?

— J’ai plus d’une fois passé des nuits ici par amour de la retraite, reprit Bulstrode avec indifférence. Je suis tout à fait disposé à faire de même aujourd’hui. Mistress Abel et son mari pourront me relayer et m’aider, si c’est nécessaire.

— Très bien, alors il suffit que je vous donne mes instructions.

— Ainsi, vous ne regardez pas la situation comme désespérée ? dit Bulstrode, quand Lydgate eut achevé de donner ses ordres.

— Non, à moins qu’il ne survienne de nouvelles complications. Il peut se produire une crise pire que celle-ci ; mais je ne serais pas étonné qu’il allât mieux au bout de quelques jours, en suivant le traitement que j’ai prescrit. Il faut de la fermeté. Rappelez-vous, s’il demande n’importe quelles liqueurs, de ne pas lui en donner. C’est un de ces cas dans lesquels, à mon avis, les malades sont plus souvent tués par le traitement que par la maladie. Toutefois de nouveaux symptômes pourront se manifester. Je reviendrai demain matin.

Après avoir attendu le billet qu’il devait remettre à mistress Bulstrode, Lydgate s’éloigna à cheval, ne cherchant pas à former de conjectures sur l’histoire de ce Raffles, mais repassant dans sa mémoire toute la discussion que venait de soulever dernièrement la publication des expériences du docteur Ware en Amérique, sur le traitement des cas d’empoisonnement par l’alcool comme celui-ci. Lydgate s’était déjà intéressé à la question pendant son séjour à l’étranger : il était fermement convaincu que la méthode la plus générale, qui était de permettre l’alcool et d’administrer sans scrupules de fortes doses d’opium n’était pas la vraie, et il