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Page:Eliot - Middlemarch, volume 2.djvu/376

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— Je pense certainement qu’il vaudrait mieux attendre, répondit celui-ci.

— Oui, oui, ma chère, dit M. Brooke, sans savoir exactement à quel point en était arrivée la discussion, mais la rattrapant bientôt avec un afflux de paroles qui pouvait s’appliquer à tout en général ; il est facile d’aller trop loin, vous savez. Il ne faut pas permettre à vos idées de s’emporter avec vous. Et quant à se presser pour mettre de l’argent dans des œuvres, cela ne fait pas l’affaire, vous savez. Garth m’a entraîné dans des dépenses extraordinaires, avec des réparations des canaux d’irrigation, toutes ces choses-là ; je suis extraordinairement en perte avec une chose ou l’autre ; il faut que je me remonte. Vous, Chettam, vous dépensez une fortune avec ces clôtures en chêne autour de votre domaine.

Dorothée ne se soumettait qu’avec peine à ces conseils décourageants ; elle se rendit avec Célia dans la bibliothèque qui lui servait habituellement de salon.

— Voyons, Dodo, écoute donc ce que dit James, commença Célia, sans quoi tu te mettras dans un vrai pétrin. Cela ne t’a jamais manqué et ne te manquera jamais, quand tu t’entêteras à vouloir faire à ta tête. Et je trouve que maintenant c’est une bénédiction, après tout, que tu aies James pour penser pour toi. Il te laisse tes plans, seulement il ne t’y laisse pas prendre. Voilà l’avantage d’avoir un beau-frère au lieu d’un mari. Un mari ne te laisserait pas aussi libre.

— Comme si j’avais envie d’un mari, dit Dorothée. Tout ce que je désire, c’est de ne pas voir mes sentiments heurtés à chaque pas.

Et mistress Casaubon encore assez mal aguerrie fondit en larmes.

— Voyons, réellement, Dodo, tu es pleine de contradictions : c’est d’abord une chose et puis une autre. Tu avais