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Page:Eliot - Middlemarch, volume 2.djvu/45

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au milieu du peuple. À Middlemarch, il avait ramassé de différents côtés une troupe d’enfants plus drôles les uns que les autres, des petits garçons sans chapeau avec les chausses tout usées et leurs petites chemises étriquées pendant au dehors, des petites filles qui, pour le regarder, écartaient les cheveux qui leur couvraient les yeux et le visage. Il emmenait sa troupe dans des excursions vagabondes à Halsell-Wood au temps des noisettes ; une fois, par un beau jour clair d’hiver, il leur alluma un feu de joie dans un ravin, sur la pente d’une colline, les régala d’un petit festin de « gingerbread » et leur improvisa un drame de « Polichinelle et sa femme », avec quelques marionnettes qu’il avait fabriquées à ses heures de loisir. C’était là une de ses fantaisies ; une autre, c’est que dans les maisons où il devenait intime, il avait l’habitude de s’étendre tout de son long devant la cheminée tout en causant, et si des visites le surprenaient dans cette attitude, on attribuait assez naturellement une semblable irrégularité de tenue à ce qu’on entendait dire du jeune homme, du mélange de sang qui coulait dans ses veines et du relâchement de ses mœurs en général.

Mais les articles de Will, comme ses discours, le recommandaient dans les familles que la nouvelle division des partis avait poussées du côté de la réforme. Il était invité chez M. Bulstrode, mais là il ne pouvait s’étendre sur le tapis de la cheminée, et mistress Bulstrode trouvait que sa manière de parler des pays catholiques, comme s’il y avait quelque vérité dans l’Antéchrist, prouvait bien la tendance ordinaire à une originalité malsaine, des hommes occupés de travaux intellectuels.

Cependant, chez M. Farebrother que l’ironie des événements avait attiré dans le mouvement national du même côté que M. Bulstrode, Will devint le favori des dames de la maison, surtout de la petite miss Noble, qu’une de ses fantaisies était d’escorter chaque fois qu’il la rencontrait