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Page:Eliot - Middlemarch, volume 2.djvu/62

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sommet d’une montagne escarpée. Elle ouvrit les yeux et vit son mari, enveloppé dans sa chaude robe de chambre, s’asseyant dans un fauteuil près du foyer où les braises brillaient encore. Il avait allumé deux bougies, et attendait que Dorothée se réveillât.

— Êtes-vous malade, Édouard ? dit-elle en se levant aussitôt.

— J’ai senti quelque malaise à demeurer couché ; je resterai assis là pour un moment.

Elle jeta du bois sur le feu, s’enveloppa d’un vêtement et lui demanda :

— Voudriez-vous que je vous fisse la lecture ?

— Vous m’obligerez beaucoup, si vous le voulez bien, Dorothée, dit M. Casaubon avec quelque chose de plus doux dans sa politesse ordinaire. Je suis très éveillé ; mon esprit est remarquablement lucide.

— Je crains que l’excitation ne soit trop forte pour vous, dit Dorothée, se rappelant les avertissements de Lydgate.

— Non, je ne sens pas d’excitation particulière. Ma pensée est très claire.

Dorothée n’osa pas insister et se mit à lire pendant une heure ou plus, de la même manière qu’elle l’avait fait dans la soirée, mais en parcourant les pages avec plus de rapidité. M. Casaubon avait l’esprit plus éveillé, et il semblait, sur la plus légère indication verbale, aller au-devant de ce qui allait suivre, disant « Cela suffit, marquez cela », ou bien « Passez au prochain titre, je supprime la seconde excursion en Crète ». Dorothée s’étonnait de voir la rapidité avec laquelle son esprit inspectait à vol d’oiseau le champ sur lequel il avait rampé pendant des années.

— Fermez le livre maintenant, ma chère, dit-il enfin. Nous achèverons demain notre travail. Je l’ai différé trop longtemps et le verrai terminé avec joie. Mais vous remar-