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Page:Eliot - Middlemarch, volume 2.djvu/63

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querez que le principe qui détermine mon choix donnera un éclaircissement approprié et convenablement proportionné à chacun des sujets énumérés dans mon introduction, qui sont esquissés pour le moment. Vous avez vu cela clairement, Dorothée ?

— Oui, dit-elle en tremblant légèrement.

Elle se sentait la mort dans le cœur.

— Et maintenant, je crois que je pourrai prendre un peu de repos.

M. Casaubon se recoucha et la pria d’éteindre la lumière. Quand elle aussi se fut recouchée et que l’obscurité, éclairée seulement par un faible rayon du foyer, se fut établie dans la chambre, il reprit :

— Avant de m’endormir, j’ai une demande à vous adresser, Dorothée ?

— Qu’est-ce ? dit-elle, l’esprit traversé de crainte.

— C’est que vous me fassiez savoir en toute assurance si, dans le cas de ma mort, vous accomplirez mes désirs : si vous éviterez de faire ce que je blâmerais, et si vous vous appliquerez à faire ce que je souhaiterais.

Dorothée n’était pas prise au dépourvu ; divers incidents avaient pu lui faire conjecturer de la part de son mari quelque intention qui pourrait créer pour elle un nouveau joug. Elle ne répondit pas tout de suite.

— Vous refusez ? fit M. Casaubon avec plus d’aigreur dans la voix.

— Non, je ne refuse pas encore, dit Dorothée d’une voix claire, le besoin de liberté s’affirmant dans son âme. Mais c’est trop solennel. Je ne trouve pas bien de faire une promesse, quand j’ignore, à quoi elle m’obligera. Tout ce que dicterait l’affection, je le ferais sans rien promettre.

— Mais, en suivant votre propre jugement. Ce que je vous demande, c’est d’obéir au mien ; vous refusez ?

— Non, cher, non, répéta Dorothée d’une voix suppliante,