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POT-BOUILLE

femme, chassée le matin. Octave se pencha ; mais, dans le trou noir de la cour, il voyait seulement de grandes ombres flottantes, que traversait un reflet de gaz venu du vestibule.

— Monsieur Vabre ! monsieur Vabre ! appela d’une voix pressante le concierge, bousculé par le menuisier. Vite, vite, elle va entrer !

Malgré ses mauvaises jambes, madame Gourd était allée chercher le propriétaire, en train justement de travailler à son grand ouvrage. Il descendait. Octave l’entendit répéter furieusement :

— C’est un scandale ! c’est une horreur !… Jamais je ne permettrai ça chez moi !

Et, s’adressant à l’ouvrier, que sa présence parut intimider d’abord :

— Renvoyez cette femme, tout de suite, tout de suite… Entendez-vous ! nous ne voulons pas de femmes dans la maison.

— Mais c’est la mienne ! répondit l’ouvrier effaré. Elle est en place, elle vient une fois par mois, quand ses maîtres le permettent… En voilà une histoire ! Ce n’est pas vous qui m’empêcherez de coucher avec ma femme, peut-être !

Du coup, le concierge et le propriétaire perdirent la tête.

— Je vous donne congé, bégayait M. Vabre. Et, en attendant, je vous défends de prendre mon immeuble pour un mauvais lieu… Gourd, jetez donc cette créature sur le trottoir… Oui, monsieur, je n’aime pas les mauvaises plaisanteries. On le dit, quand on est marié… Taisez-vous, ne me manquez pas de respect davantage !

Le menuisier, bon enfant, ayant sans doute une pointe de vin, finit par se mettre à rire.

— C’est curieux tout de même… Enfin, puisque