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POT-BOUILLE

Le jeune homme ne paraissait pas comprendre, le visage stupéfait. Pourtant, il s’inclina d’un air d’aimable obéissance.

— C’est convenu, dit à l’oreille de Valérie madame Josserand, en revenant s’asseoir sur un des fauteuils destinés à la famille, derrière ceux de Berthe et d’Auguste.

Il y avait là M. Josserand, les Vabre, les Duveyrier. Maintenant, les orgues égrenaient des gammes de petites notes claires, coupées de grands souffles. On se casait, le chœur s’emplissait, des hommes restaient dans les bas-côtés. L’abbé Mauduit s’était réservé la joie de bénir l’union d’une de ses chères pénitentes. Quand il parut, en surplis, il échangea un amical sourire avec l’assistance, où il reconnaissait tous les visages. Mais des voix attaquèrent le Veni Creator, les orgues reprirent leur chant triomphal, et ce fut à ce moment que Théophile découvrit Octave, à gauche du chœur, devant la chapelle de Saint-Joseph.

Sa sœur Clotilde voulut le retenir.

— Je ne peux pas, bégaya-t-il, jamais je ne le tolérerai.

Et il força Duveyrier à le suivre, pour représenter la famille. Le Veni Creator continuait. Quelques têtes se tournèrent.

Théophile, qui avait parlé de gifles, fut pris d’une telle émotion en abordant Octave, qu’il ne put d’abord trouver un mot, vexé d’être petit, se haussant sur la pointe des pieds.

— Monsieur, dit-il enfin, je vous ai vu hier avec ma femme…

Mais le Veni Creator finissait, il fut effrayé, lorsqu’il entendit le son de sa voix. D’ailleurs, Duveyrier, très contrarié de l’aventure, tâchait de lui faire comprendre combien le lieu était mal choisi. Devant l’autel, la