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POT-BOUILLE

— Voyons, ma cocotte, es-tu bête de pleurer !… Je suis très content. Tu veux avoir ta cousine avec toi, eh bien ! prends ta cousine avec toi. Moi, tout m’arrange… Ne pleure donc plus ! Tiens ! je t’embrasse comme je t’aime, bien fort ! bien fort !

Il la mangeait de caresses. Alors, Rose, qui fondait en larmes pour un mot, mais qui souriait tout de suite, au milieu de ses pleurs, se consola. Elle le baisa à son tour sur la barbe, elle lui dit doucement :

— Tu as été dur. Embrasse-la aussi.

Campardon embrassa Gasparine. On appela Angèle qui, de la salle à manger, regardait, la bouche ouverte, les yeux clairs ; et elle dut l’embrasser également. Octave s’était écarté, en trouvant qu’on finissait par être trop tendre, dans cette maison. Il avait remarqué avec étonnement l’attitude respectueuse, la prévenance souriante de Lisa auprès de Gasparine. Une fille intelligente décidément, cette coureuse aux paupières bleues !

Cependant, l’architecte s’était mis en manches de chemise, et sifflant, chantant, pris d’une gaieté de gamin, il employa l’après-midi à organiser la chambre de la cousine. Celle-ci l’aidait, poussait les meubles avec lui, déballait le linge, secouait les vêtements ; pendant que Rose, assise de peur de se fatiguer, leur donnait des conseils, plaçait la toilette ici et le lit de ce côté, pour la commodité de tout le monde. Alors, Octave comprit qu’il gênait leur expansion ; il se sentait de trop dans un ménage si uni, il les avertit que, le soir, il dînait dehors. D’ailleurs, il était décidé : le lendemain, il remercierait madame Campardon de sa bonne hospitalité, en inventant une histoire.

Vers cinq heures, comme il regrettait de ne savoir où rencontrer Trublot, l’idée lui vint de demander à dîner aux Pichon, pour ne point passer la soirée seul.