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LES ROUGON-MACQUART

comment veut-on que ça fasse des filles possibles !

Octave restait surpris. Il perdait de son respect pour ce salon, où il était entré avec une émotion de provincial. Une curiosité se réveilla en lui, quand il aperçut Campardon, qui consultait à son tour le docteur, mais tout bas, en homme posé, désireux de ne mettre personne dans les accidents de son ménage.

— À propos, puisque vous savez les choses, demanda-t-il à Trublot, dites-moi quelle est la maladie de madame Campardon… Je vois le monde prendre un visage désolé, quand on en parle.

— Mais, mon cher, répondit le jeune homme, elle a…

Et il se pencha à l’oreille d’Octave. Pendant qu’il écoutait, la figure de ce dernier sourit d’abord, puis s’allongea, eut un air de stupéfaction profonde.

— Pas possible ! dit-il.

Alors, Trublot jura sa parole d’honneur. Il connaissait une autre dame dans la même situation.

— Du reste, reprit-il, à la suite de couches, il arrive parfois que…

Et il se remit à parler bas. Octave, convaincu, devint triste. Lui, qui avait eu un instant des idées, qui imaginait un roman, l’architecte pris ailleurs et le poussant à sa femme pour la distraire ! En tout cas, il la savait bien gardée. Les deux jeunes gens se frottaient l’un à l’autre, dans l’excitation de ces dessous de la femme qu’ils remuaient, oubliant qu’on pouvait les entendre.

Justement, madame Juzeur était en train de confier à madame Josserand ses impressions sur Octave. Elle le trouvait très convenable, sans doute, mais elle préférait M. Auguste Vabre. Celui-ci, debout dans un coin du salon, restait silencieux, avec son insignifiance et sa migraine de tous les soirs.

— Ce qui m’étonne, chère madame, c’est que vous