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Page:Erckmann-Chatrian — L'ami Fritz (1864).djvu/121

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L’AMI FRITZ.

entra dans un pays aride, toujours à la recherche de sa fine fleur ; mais il ne trouva même plus de mousse. Il eut faim, il regarda de tous côtés, vit des chardons dans un creux… et les mangea de bon appétit. Alors ses oreilles poussèrent ; il eut une touffe de poils à la queue, il voulut hennir, et se mit à braire : c’était le premier des ânes ! »

Fritz, au lieu de rire à cette histoire, en fut vexé sans savoir pourquoi.

« Et s’il n’avait pas mangé de chardons ? dit-il.

— Alors, il aurait été moins qu’un âne vivant, il aurait été un âne mort.

— Tout cela ne signifie rien, David.

— Non ; seulement, il vaut mieux se marier jeune, que de prendre sa servante pour femme, comme font tous les vieux garçons. Crois-moi…

— Va-t’en au diable ! s’écria Kobus en se levant. Voici midi qui sonne, je n’ai pas le temps de te répondre. »

David l’accompagna jusque sur, le seuil, riant en lui-même.

Et comme ils se séparaient :

« Écoute, Kobus, fit-il d’un air fin, tu n’as pas voulu des femmes que je t’ai présentées, tu n’as peut-être pas eu tort. Mais bientôt tu t’en chercheras une toi-même.

Posché-isroel, répondit Kobus, posché-isroel ! »