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Page:Erckmann-Chatrian — L'ami Fritz (1864).djvu/135

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L’AMI FRITZ.

Alors il jetait sa carte au hasard, et naturellement il perdait.

« Je n’ai pas de chance, » se disait-il en rentrant.

Comme Schweyer avait de l’ouvrage à la maison, il ne pouvait venir que deux ou trois heures par jour, le matin ou le soir, de sorte que l’affaire traînait en longueur, et même elle se termina d’une façon singulière.

En mettant le steinberg en perce, le vieux tonnelier s’attendait à ce que Kobus allait, comme toujours, emplir le gobelet et le lui présenter. Or Fritz, par distraction, oublia cette partie importante du cérémonial.

Schweyer en fut indigné.

« Il me fait boire de sa piquette, se dit-il ; mais quand le vin est de qualité supérieure, il le trouve trop bon pour moi. »

Cette réflexion le mit de mauvaise humeur, et quelques instants après, comme il était baissé, Kobus ayant laissé tomber deux gouttes de cire sur ses mains, sa colère éclata :

« Monsieur Kobus, dit-il en se levant, je crois que vous devenez fou ! Dans le temps, vous chantiez le Miserere, et je ne voulais rien dire, quoique ce fût une offense contre notre sainte religion, et surtout à l’égard d’un vieillard de mon âge : vous