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Page:Erckmann-Chatrian — L'ami Fritz (1864).djvu/231

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L’AMI FRITZ.

faites excuse, je devrais déjà être depuis deux heures à la ferme.

— Bah ! s’écriait Fritz en lui posant la main sur l’épaule, ceci n’arrive pas tous les jours, père Christel ; il faut bien de temps en temps s’égayer et se dégourdir l’esprit. Allons, encore une chope ! »

Et le vieil anabaptiste, un peu gris, se rasseyait en pensant : « Cela fera la sixième ! Pourvu que je ne verse pas en route ! »

Puis il disait :

« Mais, monsieur Kobus, qu’est-ce que pensera ma femme si je rentre à moitié gris ? Jamais elle ne m’aura vu dans cet état !

— Bah ! bah ! le grand air dissipe tout, père Christel, et puis vous n’aurez qu’à dire : « M. Kobus l’a voulu ! » Sûzel prendra votre défense.

— Ça, c’est vrai, s’écriait alors Christel en riant, c’est vrai : tout ce que dit et fait M. Kobus est bien ! Allons, encore une chope ! »

Et la chope arrivait, elle se vidait ; la servante en apportait une autre, ainsi de suite.

Or, sur le coup de trois heures, à l’église Saint-Sylvestre, et comme on ne pensait à rien, une troupe d’enfants tourna le coin de l’auberge du Cygne, en courant vers la porte de Landau ; puis quelques soldats parurent, portant un de leurs camarades sur un brancard ; puis d’autres enfants