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Page:Erckmann-Chatrian — L'ami Fritz (1864).djvu/238

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L’AMI FRITZ.

« Et, ajouta-t-il en levant le doigt, je voudrais que toute la ville et le pays à la ronde eussent un grand respect pour mon amoureuse ; quand même elle ne serait pas de mon rang, de ma condition et de ma fortune : le moindre blâme sur elle deviendrait la cause d’une terrible bataille.

— Alors, dit Hâan, Dieu fasse que tu ne tombes jamais amoureux, car tous les hussards de Frédéric-Wilhelm ne sont pas morts, plus d’un courrait la chance de mourir si ton amoureuse était jolie. »

Les sourcils de Fritz tressaillirent.

« C’est possible, fit-il en se rasseyant, car il s’était dressé. Moi je serais fier, je serais glorieux de me battre pour une si belle cause ! N’ai-je pas raison, Christel ?

— Tout à fait, monsieur Kobus, dit l’anabaptiste un peu gris ; notre religion est une religion de paix, mais dans le temps, lorsque j’étais amoureux d’Orchel, oui, Dieu me le pardonne ! j’aurais été capable de me battre à coup de faux pour l’avoir. Grâce au ciel, il n’a pas fallu répandre de sang ; j’aime bien mieux n’avoir rien à me reprocher. »

Fritz voyant que tout le monde l’observait, comprit l’imprudence qu’il venait de commettre. Le vieux rebbe David surtout ne le quittait pas de