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Page:Erckmann-Chatrian — L'ami Fritz (1864).djvu/252

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L’AMI FRITZ.

son gobelet, déplorable I Je me rappelle que, dans mon enfance, tous les bons bourgeois allaient aux fêtes de villages avec leurs femmes et leurs enfants ; maintenant on croupit chez soi, c’est un événement quand on sort de la ville. Aux fêtes de village, on chantait, on dansait, on tirait à la cible, on changeait d’air ; aussi nos anciens vivaient cent ans ; ils avaient les oreilles rouges, et ne connaissaient pas les infirmités de la vieillesse. Quel dommage que toutes ces fêtes soient abandonnées !

— Ah ! cela, s’écria Hâan, très-fort sur les vieilles mœurs, cela, Kobus, résulte de l’extension des voies de communication. Autrefois, quand les routes étaient rares, quand il n’existait pas de chemins vicinaux, on ne voyait pas circuler tant de commis voyageurs, pour offrir dans chaque village, les uns leur poivre et leur cannelle, les autres leurs étrilles et leurs brosses, les autres leurs étoffes de toutes sortes. Vous n’aviez pas à votre porte l’épicier, le quincaillier, le marchand de drap. On attendait, dans chaque famille, telle fête pour faire les provisions du ménage. Aussi les fêtes étaient plus riches et plus belles ; les marchands étant sûrs de vendre, arrivaient de fort loin. C’était le bon temps des foires de Francfort, de Leipzig, de Hambourg, en Allemagne ; de