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Page:Erckmann-Chatrian — L'ami Fritz (1864).djvu/267

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L’AMI FRITZ.

car s’il manquait de bon sens, ses parents en auraient eu pour lui. »

Fritz partit d’un éclat de rire :

« Ha ! ha ! ha ! tu as de drôles d’idées, Katel, fit-il ; mais c’est égal, je crois que tu n’as pas tout à fait tort. Maintenant il nous faudrait des bas.

— Tenez, les voici, monsieur, des bas de soie ; voyez comme c’est souple, moelleux ! Mme Kobus elle-même, les a tricotés avec des aiguilles aussi fines que des cheveux : c’était un grand travail. Maintenant on fait tout au métier, aussi quels bas ! On a bien raison de les cacher sous des pantalons. »

Ainsi s’exprima la vieille servante, et Kobus, de plus en plus joyeux, s’écria :

« Allons, allons, tout cela prend une assez bonne tournure ; et si nous avons des habits un peu passables, je commence à croire que les Prussiens auront tort de se moquer de nous.

— Mais, au nom du ciel, dit Katel, ne me parlez donc pas toujours de vos Prussiens ! de pauvres diables qui n’ont pas dix thalers en poche, et qui se mettent tout sur le dos, pour avoir l’air de quelque chose. Nous sommes d’autres gens ! nous savons où reposer notre tête le soir, et ce n’est pas sur un caillou, Dieu merci ! Et nous savons aussi où trouver une bouteille de bon vin, quand il nous