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Page:Erckmann-Chatrian — L'ami Fritz (1864).djvu/291

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L’AMI FRITZ.

à la cuisine. Au bout d’un quart d’heure, Hâan et Schoultz, ne le voyant pas rentrer, s’en étonnèrent beaucoup, d’autant plus qu’on apportait les soupières, et que tout le monde prenait place à table.

Fritz s’était souvenu qu’au fond de la ruelle des Oies, derrière Bischem, vivaient deux ou trois familles d’anabaptistes, et que son père avait l’habitude de s’arrêter à leur porte, pour charger un sac de pruneaux secs en retournant à Hunebourg. Et, songeant que Sûzel pouvait être chez eux, il était descendu sans rien dire dans le jardin du Mouton-d’Or, et du jardin dans la petite allée des Houx, qui longe le village.

Il courait dans cette allée comme un lièvre, tant la fureur de revoir Sûzel le possédait. C’est lui qui se serait étonné, trois mois avant, s’il avait pu se voir en cet état !

Enfin, apercevant le grand toit de tuiles grises des anabaptistes par-dessus les vergers, il se glissa tout doucement le long des haies, jusqu’auprès de la cour, et là, fort heureusement, il découvrit entre le grand fumier carré et la façade décrépite tapissée de lierre, la voiture du père Christel, ce qui lui gonfla le cœur de satisfaction.

« Elle y est ! se dit-il, c’est bon… c’est bon ! Maintenant je la reverrai, coûte que coûte ; il fau-