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Page:Ernest Cœurderoy - Hurrah !!!.djvu/348

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quand la terre les réclame, on lui confie les restes des vieillards.

» Nous sommes les tiges flétries, les grappes dépouillées et les écorces vides. Nous n’avons plus que quelques jours à passer ici-bas, et nous ne verrons pas les cités de la Terre-Promise.

» Nous sommes vieux comme les peuples que nos fils vont conquérir ; comme eux nous allons payer tribut à la Nature, toujours jeune.

» À quoi nous serviraient les grands temples, les rues larges et les maisons élevées ? À quoi nous serviraient les métaux, les pierres, l’eau, le sol et le feu ?

» Nous ne pouvons plus remplir les vastes dômes de nos voix mourantes. Et nos bras sont trop débiles pour dompter les coursiers et les atteler aux chars de bataille. Nous n’avons plus de force pour tailler la pierre, endiguer les fleuves, forger le fer et diriger le soc de la charrue.

» Nous sommes à la merci de l’incendie, de l’ouragan et des inondations, et si nous voulions fuir la foudre, nos pauvres jambes nous manqueraient.

» Qu’ils reviennent donc les guerriers sortis de nos reins. afin que nous puissions chanter leur gloire en exhalant notre dernier soupir !

» Et si nous ne devons pas les revoir, que la neige nous enveloppe dans son blanc linceul. Car la neige est froide, c’est la fiancée du vieillard ! »