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Page:Ernest Cœurderoy - Hurrah !!!.djvu/357

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contre un morceau de pain ; ils seront nombreux, ceux qui se mettront au travail avec l’estomac vide ! Il restera cependant quelques bourgeois qui mourront de gras fondu !

En ce temps-là, l’intérêt sera devenu si rapace, et la misère si générale, que ceux qui pourront vivre fermeront leurs portes afin de ne pas entendre ceux qui râlent dans l’escalier. Les mères arracheront leurs enfants de leurs seins flétris et les coucheront dans le lit des eaux. En ce temps-là les sentiments les plus ignobles, tous ceux qu’on enfouit aujourd’hui jusqu’au tréfonds des âmes, éclateront avec fracas.

Les hommes arriveront à un tel point d’indifférence, qu’il ne sera pas plus tenu compte de la mort d’un individu que de celle d’un poulet. Ils en arriveront à un tel point de désespoir, qu’ils invoqueront le secours du Choléra contre les tortures de la Faim. Alors la vie sera pour les uns une angoisse constante, et pour les autres, un insupportable fardeau. Ah ! je juge par le présent de cet épouvantable avenir !

Malheur aux jeunes hommes, s’il en reste encore, qui s’éprendront de la Liberté ! L’ardente fille les consumera, comme le soleil brûle les feuilles d’automne. Et la terre en sera jonchée. Oh ! souffrir de la faim et la soif, ce ne serait rien ! Mais il faudra se voir méprisé par le premier imbécile venu, quand il sera vêtu correctement ! Dès à présent, on ne salue de vous que votre chapeau et votre linge : avec une paire de gants vous pouvez vous concilier l’estime de ce public stupide !

En ce temps-là, une destinée sombre pèsera sur ceux qui pensent. Les plus grands honneurs reviendront de droit aux plus pauvres d’esprit.

Bien peu d’hommes auront le courage de résister à tant