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Page:Ernest Cœurderoy - Hurrah !!!.djvu/420

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Sur la mer transparente le lourd vaisseau de haut-bord, le rapide vapeur aux nageoires de fer, la jonque chinoise et la légère pirogue du Polynésien se rencontrent. De tous les ports du monde, je vois les hommes accourir vers l’Océanie fortunée.

Nombreux sont les Anglais, héroïques spéculateurs ; nombreux les Américains, leurs frères ; nombreux les Hollandais, économes exploiteurs des mers du Sud ; nombreux aussi les Chinois, objet d’étonnement pour les autres peuples. Je distingue aussi la plainte de tes fils, ô malheureuse Erin ! la prière d’amour de l’Allemand, le bavardage du Français, l’emphase de l’Espagnol… Le Suisse ne dit rien, mais n’en calcule pas moins.

La plupart sont arrachés par la misère au rivage natal, à la paix du foyer. Tremblants de convoitise, beaucoup se dégagent des étreintes de la femme aimée qui leur tend ses enfants comme un reproche amer. — Soif damnée que cette soif de l’or !

Ceux-ci sont téméraires, ceux-là désespérés ; les uns calculent sur la chair des autres. Combien fuient les guerres et les révolutions européennes, de ceux qui les ont déchaînées comme de ceux qui les ont combattues ! Combien laissent derrière eux le théâtre de leurs crimes, de leur mauvaise fortune ou de leurs souffrances ! — Nuages des cieux, vous seuls recevez toutes ces confidences et les emportez loin de nous !

— Et me tournant vers l’Ange des Révolutions, je m’écriai : Grand ! trois fois Grand ! sois loué parmi les hommes, toi qui réunis vainqueurs et vaincus, assassins et victimes ; toi qui ramasses, dans tes bras géants, peuples du Nord et du Midi, peuples du Couchant et de l’Aurore, et confonds dans un seul leurs ardents transports !!

Et de ses mille voix l’Océan chantait avec moi ! Et de ses milles vagues il dansait, approuvant mes paroles !!