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Page:Ernest Cœurderoy - Hurrah !!!.djvu/70

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son cœur ne bat enfin que lorsque sa puissance est assise et ses aspirations sociales révélées. La capitale d’une nation, c’est le sceau qu’elle appose sur son travail de croissance.

Quand une société va succomber, il est nécessaire que celle qui lui succède ne se substitue que lentement à elle, du dehors au dedans. Supposez, en effet, dans cette vieille société-ci, une révolution intégrale s’implantant subitement au centre ? Imaginez, par exemple, une révolution dont le mot d’ordre serait : Suppression de l’aubaine de la propriété et de l’intérêt du capital, maîtresse aujourd’hui de Paris ! — Qu’arriverait-il ?

Ce que nous pouvons lire dans l’histoire, ce qui s’observe dans la nature. Les provinces étoufferaient Paris ; Paris lui-même étoufferait le gouvernement initiateur de cette révolution. C’est-à-dire que le cœur succomberait sous les efforts des membres ; ou bien encore, que la bourgeoisie française étranglerait la dictature révolutionnaire de Paris. Cela s’est vu trois fois depuis cinquante ans ; cela se verra tant que la majorité des intérêts bourgeois ne sera pas définitivement dissoute.

Il se produit alors dans la société ce qui se produirait chez l’homme s’il était possible qu’un cœur d’enfant se trouvât au centre d’un corps dont tous les autres organes seraient constitués depuis longtemps : — Les membres seraient d’un géant, et le cœur d’un enfant ; un semblable monstre ne saurait vivre.

D’où résulte, comme application à l’état actuel de l’Europe, qu’une nouvelle société devant se former dans l’Occident, ce n’est pas du centre du monde civilisé que se lèvera la Révolution ; — mais qu’elle viendra du dehors, et que, cheminant lentement de la circonférence au centre, elle assujettira les pays en décadence par zones d’invasions successives.