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Page:Espaces libres et Fortifications - Albert THOMAS.pdf/34

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en tous pays une classe ouvrière forte au physique et au moral. Cette classe-là seulement sera révolutionnaire.

Mais, bien plus, c’est déjà faire œuvre socialiste c’est déjà donner dans les choses, matériellement, une image de la cité de demain que d’assurer, par des plans d’extension établis longtemps à l’avance, le développement d’une grande agglomération, où les préoccupations du travail s’harmoniseront délicieusement aux besoins de l’hygiène et de la beauté.

Il y a soixante-dix ans déjà que le socialiste Pecqueur posait la question. « Où chercher, — disait-il après avoir décrit le lieu d’étouffement et le cloaque d’égouts qu’est une ville moderne, — où chercher l’image de ce bel Eden, dans lequel la Bible fait naître Adam, le Père commun ? Est-ce là un progrès ou une chute ? Les grandes villes, à la manière de notre civilisation, est-ce l’avenir, est-ce le passé ? » [1].

Soixante-dix ans de vie capitaliste permettent de répondre avec Pecqueur : c’est le passé. Il est temps que la prédiction du vieux penseur se réalise ; il est temps qu’au tour des bâtiments urbains « des arbres, de l’eau, un air libre, viennent entretenir la salubrité de chaque quartier, y faire souvenir de l’aspect des campagnes et lui donner même cet aspect, sans lequel une ville est quelque chose de monstrueux, de délétère… [2]. Il est temps, en un mot, que, par l’effort socialiste, le Paris nouveau surgisse, et que, selon le beau mot d’Elisabeth Browning, « il nage dans la verdure, aussi beau que Venise sur les eaux ».


15 octobre 1908.
  1. Pecqueur, Des intérêts du commerce. Tome I, p. 170.
  2. Ibidem, p. 171.