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Page:Espronceda - L’Étudiant de Salamanque, trad. Foulché-Delbosc, 1893.djvu/29

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mes mains et vilement, au lieu de vous demander raison, arracher votre cœur et piétiner votre langue. Car une âme, une vie, c’est une satisfaction bien légère ; si je le pouvais, je vous en donnerais mille pour vous les ôter ensuite. Il faut que toutes tes veines ouvertes donnent à boire à mes lèvres, et c’est à peine si tout ton sang suffira à calmer ma soif ! Misérable !

(Il tire son épée : tous les joueurs s’interposent.)
TOUS.

Hors d’ici le querelleur !

DON FÉLIX (se levant avec calme).

Remettez votre épée, don Diego ; considérez que je garde tout mon sang-froid et que je ne sais ce qui me fait, en mon ardente colère, écouter si froidement vos injures.

DON DIEGO

Sortez d’ici, car, par ma foi, je suis résolu à vous tuer, et la Vierge Marie elle-même ne réussirait pas à vous tirer de mes mains. Ma volonté est si arrêtée, mon âme est si résolue, que ma fureur même est calmée par ma ferme résolution. Venez avec moi.

DON FÉLIX.

J’y vais, mais si je vous tue, don Diego, qu’un autre ne vienne pas m’en demander compte. Je suis à vous. Attendez que je compte mon argent… un… deux…

(À don Diego.)

C’est mon gain, vous êtes cause que je perds ici une grande quantité d’or que j’allais gagner… et pourquoi ? Dix… quinze… pour je ne sais quelle histoire d’amour…