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Page:Evariste Huc - Empire chinois ed 5 vol 1.djvu/329

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Après ce petit incident, nous n’avions plus, assurément, envie de dormir, notre docteur nous avait emporté le sommeil ; nous descendîmes donc de notre forteresse pour aller visiter en détail lu temple des compositions littéraires. Nous nous rendions, à travers le jardin, vers la pagode de Confucius, lorsque nous aperçûmes, au fond d’un long corridor qui conduisait à la rue, un malheureux agenouillé et chargé d’une grosse cangue. On sait que la cangue est une énorme pièce de bois, percée au milieu pour faire passer la tête du condamné, et qui pèse de tout son poids sur ses épaules, de façon que cet atroce supplice réduit un homme à n’être plus, en quelque sorte, que le pied ou le support d’une lourde table. Nous dirigeâmes nos pas du côté de la porte, vers ce malheureux condamné qui, en nous voyant, implora de loin notre miséricorde, et nous pria de lui pardonner ; nous approchâmes de lui, et nous fûmes émus profondément de voir, dans cette horrible situation, un bourgeois assez bien vêtu, d’une figure honnête, et qui versait d’abondantes larmes en nous conjurant toujours de lui pardonner ; c’était un spectacle déchirant. Nous avançâmes de plus près pour lire la sentence qui, selon l’usage, était écrite en gros caractères sur des bandes de papier blanc collées sur la cangue. A peine eûmes nous parcouru des yeux l’inscription et connu le motif pour lequel ce pauvre homme était condamné, que nous sentîmes une sueur glacée se répandre tout à coup sur notre front. Voici ce que nous avions lu sur les diverses bandes de papier blanc : Condamné à quinze jours de cangue, sans excepter les nuits ; péché d’irrévérence envers les étrangers de