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Page:Evariste Huc - Empire chinois ed 5 vol 1.djvu/330

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l’Occident, qui sont sous la protection de l’empereur ; que le peuple tremble ; qu’il réfléchisse et se corrige de ses défauts… Sur chacune des trois bandes il y avait le cachet rouge du préfet de Fou-ki-hien.

Le tribunal n’était heureusement qu’à quelques pas du wen-tchang-koun ; nous y courûmes en toute hâte, et nous eûmes une courte explication avec le préfet, qui vint aussitôt avec nous pour rendre la liberté à ce malheureux. Mais, avant de lui faire ôter la cangue, il se crut obligé de lui adresser un long discours, d’abord sur la nature miséricordieuse de notre cœur, et puis sur la pratique des trois rapports sociaux. Cette harangue nous impatienta ; il y avait des moments où nous eussions, en vérité, désiré voir ce discoureur intempestif à la place du patient, dont tout le crime était d’avoir dit à un gardien du temple : Il y a quelques années, les diables occidentaux venaient du côté du midi ; voilà maintenant qu’il en arrive aussi du nord. » Ce bon bourgeois nous avait donné, il faut en convenir, un sobriquet peu poli, mais il ne l’avait pas inventé ; car c’est sous cette maligne dénomination que les Européens sont le mieux connus en Chine. S’il fallait mettre à la cangue ceux qui l’emploient, l’empire tout entier devrait y passer, en commençant par les mandarins.

Aussitôt que ce brave homme eut été délivré de la cangue, nous lui fîmes la courtoisie de l’inviter à venir causer dans notre chambre, où on lui servit du thé et une petite collation. Nous lui exprimâmes de notre mieux combien nous étions sincèrement peinés d’avoir été la cause involontaire de cette déplorable aventure.