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Page:Féval - Le chevalier ténèbre, 1925.djvu/32

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Aux rayons de la lune, on pouvait voir sur sa longue figure un regard satisfait. Il tira de sa poche une vaste boîte d’or, enrichie de gros diamants qui chatoyèrent, lançant de tous côtés des gerbes d’étincelles.

— Messeigneurs et mes nobles dames, reprit-il posément en jouant avec cette royale tabatière qui semblait, en vérité, dans ses mains, une poignée de rayons, mon frère Bénédict n’a pas eu tort et n’a point révélé, comme son Excellence paraît le croire, le secret de la comédie. Plût à Dieu que tout ceci fût une comédie ! Malheureusement, en racontant des histoires comme celle-ci, on peut dédaigner l’habileté. Pas n’est besoin de ménager avec soin les petits effets et les petites surprises familiers aux conteurs. Je vous en donne une nouvelle preuve en vous disant tout de suite une chose dont je devrais vous faire un mystère peut-être : c’est à savoir que les frères Ténèbre sont à Paris, tous les deux, le petit et le grand et que je viens les y poursuivre à mes risques et périls, risques fort graves, périls très manifestes… mais chaque homme a son devoir.

Pour le coup, la moitié du cercle tressaillit tout de bon, tandis que le surplus dressait l’oreille. L’évêque d’Hermopolis, qui s’obstinait à voir les choses au point de vue de l’art, battit des mains et cria bravo. La princesse rappela son fils, le marquis de Lorgères, à ses côtés.

— Voilà qui passe la plaisanterie, murmura-t-elle.

M. le baron d’Altenheimer aspira sa prise de tabac lentement, puis, lentement, il secoua le revers de son habit noir. Nous devons avouer qu’on fait mieux que cela à la Comédie-Française ; pour ce geste, il faut un jabot. Néanmoins, ce n’était pas mal, pour un homme de Westphalie.

— Voilà ! poursuivit M. le baron d’un ton délibéré : je cours tout uniment après les joyaux de la couronne de Wurtemberg. Figurez-vous bien, mes nobles dames,