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Page:Féval - Les Compagnons du trésor, 1872, Tome I.djvu/89

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Vincent Carpentier était de ces natures solitaires qui raisonnent, calculent et comparent. Il avait en lui de quoi fabriquer ce compas intellectuel, mystérieux et puissant comme une sorcellerie.

Avant même que sa volonté fût complice, l’esprit d’investigation s’était éveillé en lui.

Il cherchait, tout en disant : « Je ne veux pas chercher, » et il en était encore à se mentir ainsi, qu’il avait déjà trouvé peut-être.

C’était un caractère singulier. Le colonel, malgré ses caresses, lui inspirait une invincible défiance qu’il acceptait comme pressentiment. Il arrive, en effet, souvent que les vivants outils employés aux opérations du genre de celle que Vincent venait d’accomplir sont brisés après la besogne achevée.

Vincent croyait à cela.

Les calculateurs de la probabilité ne rejettent jamais un fait parce qu’il est romanesque ou même invraisemblable, au point de vue de la moyenne des mœurs et des opinions.

Ils ont raison.

C’est en adorant cette idole imbécile, la vraisemblance que les juges ont crevé les deux yeux de la justice.

Vincent s’était dit très sérieusement dès l’abord :

— Il se peut que je sois assassiné.

Il avait gardé cette idée, malgré la somme des