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Page:Féval - Les Habits noirs, 1863, Tome II.djvu/119

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Il l’interrompit encore pour prononcer avec tristesse :

« Le monde n’a rien à faire entre ma mère et moi.

— C’est vrai ! dit Edmée naïvement et non sans joie, je n’avais pas songé… tu ne peux pas être le fils du baron Schwartz. »

Comme il baissait les yeux, elle lui reprit la tête à deux mains.

« Je ne sais pas ce que je dis, s’écria-t-elle. Voilà si longtemps, si longtemps que je souffre ! Ce n’est pas un reproche, mon Michel bien-aimé, c’est une excuse. Je voudrais parler souvent, parler toujours de ta mère, et ne jamais rien dire qui ne fût respect et amour…

— Elle t’adorera ! répéta Michel, j’en suis sûr.

— Et ta sœur ! Oh ! c’était déjà une bonne petite sœur pour moi. Que de fois son rire joyeux m’a fait du bien jusqu’au fond de l’âme !… Et vas-tu laisser ce mariage s’accomplir ! Blanche ! notre cher ange ! épouser M. Lecoq ! »

Notre héros Michel prit un air important.

« Chérie, répondit-il, nous causerons de ces choses-là. Je sais pourquoi vous n’aimez pas M. Lecoq, et Dieu me garde de m’en plaindre !

— Tu sais pourquoi je n’aime pas M. Lecoq ! » répéta Edmée en pâlissant.

Elle regardait Michel avec une sorte d’effroi. Il éclata de rire.

« Qui est là ? demanda pour la seconde fois la vieille dame, réveillée en sursaut.

— C’est moi, ma bonne madame Leber, répondit encore Michel.

— Ah ! ah ! c’est toi, méchant sujet ! As-tu une place ?… Edmée ! mon enfant, la lampe et mon ouvrage. Je veux travailler un petit peu. »