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Page:Féval - Les Habits noirs, 1863, Tome II.djvu/125

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« Veux-tu toujours mieux voir que moi, chérie ? demanda-t-il. Il faut le dire ! »

Puis il ajouta sérieusement :

« Vous êtes la meilleure petite âme que je connaisse ; mais la meilleure petite âme du monde, quand elle est femme, la plus modeste, la plus naïve, la plus loyale, a toujours pour un peu la prétention d’être fée. C’est votre fatuité à vous autres. Comme la fatuité est le plus dur des entêtements, je vais frapper sur la tienne à tour de bras, du premier coup. Réponds à une simple question : Si M. Lecoq avait sur toi, et par conséquent sur moi, les mauvais desseins que tu lui supposes, ne serait-il pas très avantageux pour lui de me voir sous les verrous ? hein ?

— Que dis-tu là ? murmura Edmée qui bondit sur son siège.

— Réponds… c’est clair comme le jour, ce raisonnement-là. Je suis un obstacle ; un obstacle qu’il serait dangereux de mépriser. Eh bien ! à l’heure qui est, sans M. Lecoq, je serais en prison. »

Edmée répéta, laissant voir son effroi.

« En prison, toi, Michel ! Et pourquoi ?

— Parce que, répliqua notre héros un peu déconcerté, mais souriant a la naïveté de son explication, parce que j’ai eu la fantaisie de faire fortune tout un coup. Voilà ! »

Puis s’interrompant et laissant parler cette juvénile franchise qui était son charme :

« Oh ! dit-il, ce n’est pas précisément l’amour de l’or : à cet égard-là, ma vocation tarde à se montrer. C’était pour vous, Edmée, que je voulais être riche.

— Je n’ai pas besoin d’être riche, déclara la jeune fille avec quelque sévérité.