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Page:Féval - Les Habits noirs, 1863, Tome II.djvu/136

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vers le jeu : j’ai gagné trois cents louis, veux-tu des à-compte ? »

En prononçant ces derniers mots d’un air joyeux, Michel avait plongé des deux mains, dans ses goussets qui sonnaient l’or. Il s’interrompit et changea de visage en voyant l’étrange expression qui se peignit sur les traits d’Edmée.

La jeune fille avait d’abord écouté avec tristesse cette folle péroraison, mais tout à coup son regard s’était animé et ce n’étaient point les paroles de Michel qui avaient produit ce résultat ; Edmée fixait ses yeux agrandis sur la fenêtre. Michel se retourna vivement pour voir ce qui attirait ainsi son attention. Ils se levèrent tous les deux en même temps et brusquement.

De l’autre côté de la cour, la chambre de Michel, qui était restée noire si longtemps, venait de s’éclairer. L’absence de rideaux en montrait exactement le contenu. Étienne et Maurice étaient là, debout, dans le négligé plus qu’original de leur toilette d’intérieur. Maurice tenait la lampe à la main. Étienne courbé en deux, exécutait un profond salut devant une dame vêtue de noir et dont le visage disparaissait sous un voile de dentelles posé en double.

« Ma mère ! murmura Michel ! c’est ma mère !

— Je croyais la reconnaître, » dit Edmée, dont le cœur eut un élancement au souvenir de sa torture passée.

Michel n’avait fait qu’un bond jusqu’à la porte.

Edmée, curieuse, éteignit sa lampe et ouvrit sa fenêtre.

Mme la baronne Schwartz, car c’était bien elle, avait déjà disparu, et nos deux collaborateurs rentraient dans leur dramatique logis, cherchant sans doute le moyen de caser utilement cette surprenante visite à quelque bon endroit du drame.