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Page:Féval - Les Habits noirs, 1863, Tome II.djvu/243

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côtoyant le premier cirque, bâti par les frères Franconi, faubourg du Temple, no 16, elle franchissait cette grande voie pour entrer dans un passage borgne, non loin du restaurant Passoir.

Dès lors, l’aspect changeait. Le chemin des Amoureux méritait presque son nom. Il longeait d’un côté des maisons, tristes comme les villas en forme de tombes qui égayent certains environs de Paris, et toutes bâties en contre-haut ; de l’autre, une haie, une véritable haie de sureaux malades, soutenus par des piquets vermoulus. La haie défendait des terrains vagues où il y avait des chèvres, des chardons ou des choux. Les amoureux y venaient. Ils avaient la tournure qu’il fallait pour animer et compléter le paysage.

Au mois de janvier 1833, un amoureux, le bijoutier Lassusse, jeune homme de vingt-deux ans, maladif et contrefait, fut assassiné à coups de barre de fer et enterré de l’autre côté de la haie, non loin de l’entrepôt actuel de la douane. Sa fiancée demeurait rue Fontaine-au-Roi, et il regagnait son domicile, situé passage de l’industrie, quand le meurtre eut lieu, — à quatre heures du soir !

Le chemin des Amoureux, bizarrement calibré, avait en son parcours de très variables largeurs. La plupart du temps, deux hommes y marchaient difficilement de front, et plusieurs de ses défilés eussent pu être défendus mieux que les Thermopyles. Il était cependant carrossable en deux endroits : aux environs de la rue de Lancry et dans la partie qui, sous le nom de rue du Haut-Moulin, remontait du faubourg du Temple aux chantiers de Malte.

Dans la nuit du mardi au mercredi, c’est-à-dire un peu plus de quarante-huit heures après cette soirée du dimanche dont nous avons raconté l’histoire, un coupé