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Page:Féval - Les Habits noirs, 1863, Tome II.djvu/293

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de ton nez, bonhomme, eh ! Je t’annonce que ton rapport sur l’entre-sol de l’hôtel Schwartz te vaudra dix mille livres de rente, c’est réglé. Toi, Cocotte, en route ! tes empreintes seront payées juste le même prix. »

Nous avons laissé la voiture de la comtesse Corona galopant vers la porte Saint-Martin. On était en train d’opérer de grands travaux vis-à-vis du théâtre, à cet endroit qui est la honte du boulevard, et que la gaieté populaire désigne plaisamment sous le nom de « l’écluse Saint-Martin. » Le cocher Battista, beau gaillard, brun comme un sang mêlé, n’avait pas entendu ce cri qui avait précipité la course de M. Bruneau dans le faubourg du Temple. À moitié endormi qu’il était, à la hauteur du Banquet d’Anacréon, au moment où les obstacles accumulés sur la voie ralentissaient forcément la marche du coupé, il fut éveillé en sursaut par une violente oscillation imprimée à sa voiture.

Il se retourna. La portière était ouverte, et un homme fuyait vers le boulevard du Temple.

Battista appela sa maîtresse ; elle ne répondit pas. Il descendit de son siège et trouva dans le coupé la comtesse Corona, qui était étendue en travers — et morte.

C’était un fidèle serviteur ; instinctivement, il remonta sur son siège et poussa son cheval à la poursuite du fugitif, qui, sans nul doute, devait être l’assassin. Celui-ci avait disparu. Après une course désordonnée de quelques minutes, en droite ligne, l’idée vint à Battista qu’un secours était encore possible peut-être. Il arrêta sa voiture en face de la Galiote et retira de la caisse le cadavre de la comtesse.

Il le porta jusqu’au banc voisin où déjà Edmée Leber était couchée.