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Page:Féval - Les Habits noirs, 1863, Tome II.djvu/33

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— Excepté ce matin-là. Oh ! mais, écoute ! Voici notre idée de Trois-Pattes ! Un déguisement… une vengeance… un grand secret à pénétrer… Sais tu que c’est beau comme les sauvageries de Cooper, cette machine-là !

— Oui, dit Maurice avec distraction. Je me souviens que cela me plaisait. »

Il gagna le lit sur lequel il s’étendit nonchalamment.

« Veux-tu y revenir ?

— Non. Je ne veux plus rien.

— Et pourtant, s’interrompit-il en se soulevant sur le coude, il y a là dedans quelque chose, et je me souviens que cette idée m’a échauffé une fois déjà ; les sauvages de Cooper en plein Paris ! La grand’ville n’est-elle pas aussi mystérieuse que les forêts vierges du nouveau monde ? Ce mutilé suivant patiemment une piste, au milieu de nos rues où tant de pistes se croisent… Cette haine acharnée qui se voile sous une hideuse et lamentable infirmité… Je lui voudrais une fille, à ce monstre… un fils, plutôt, qu’il dote du fond de sa misère… La pension de Michel…

— Tonnerre ! s’écria Étienne, pâle d’émotion, tu as mis dans le blanc, pour le coup !

— J’étais séduit par une image. Je voyais ce misérable, noyé sous le flot humain et dont la tête est un pavé sur lequel tout pied marche, je le voyais, gardant assez de vertu pour tendre un bras infatigable et soutenir, tout au bout de ce bras, un être cher au-dessus du niveau qui le submerge…

— Si ce n’est pas un drame, cela, je veux être teneur de livres !

— Je le voyais ainsi…

— Eh bien !