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Page:Féval - Les Habits noirs, 1863, Tome II.djvu/388

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tu seras riche ! N’appuie pas sur mon bras droit, malheureux !… Mais pourquoi as-tu dit tout à l’heure : « Nenni-dà, vous n’êtes pas le Maître ! »

— Parce que le MAÎTRE, répliqua Trois-Pattes, est celui qui possède le scapulaire et le secret.

— J’ai les deux.

— Vous n’avez ni l’un ni l’autre, patron… La comtesse était une belle femme.

— Tu me gardes rancune pour ce coup-là, hé ? »

Trois-Pattes répondit évasivement :

« Que vaut une belle femme morte ! »

Et il toussa, comme s’il eût voulu ponctuer pour ses compagnons invisibles le premier aveu de M. Lecoq.

« Seulement, reprit-il, ce coup-là ne vous a servi en rien. Un autre a le scapulaire et le secret.

— Qui, cet autre ?

— Dites donc, patron, s’écria subitement l’estropié, la caisse est ouverte, et, en avançant la main, je viens de sentir les liasses de billets. C’est doux. Il y en aurait qui vous planteraient là et qui s’en iraient riches ! »

M. Lecoq eut un rire rauque.

« Te crois-tu donc libre ? » murmura-t-il.

Les reins de Trois-Pattes sentirent la vigoureuse pression de sa main.

« Patron, ne serrez pas trop fort ! intercéda-t-il. Je suis une pauvre créature. »

Mais il ajouta d’un accent étrange :

« Quoique un homme robuste, dans votre position, ne vaille pas un éclopé comme moi. Raisonnons : vous n’avez qu’une main ; si vous ne me lâchez pas, je peux vous poignarder à mon aise, et, si vous me lâchez, bonsoir les voisins ! »

La respiration oppressée de Lecoq siffla dans sa poitrine.