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Page:Féval - Les Habits noirs, 1863, Tome II.djvu/406

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de punir : volonté froide, éprouvée, inébranlable. Dieu seul, désormais, pourrait mettre un obstacle entre ma main et le coupable.

« Quelles que soient les apparences, je suis juge. Ici est mon tribunal. Mon arrêt sera prononcé sans passion ni hâte. J’ai le temps. Nul ne viendra du dehors ; l’état-major des Habits Noirs a des intelligences partout et doit être averti déjà. Peu importe : le secret dévoilé, l’association mourra. Nul ne viendra de l’intérieur ; cette maison est en fête, écoutez ! »

L’harmonie lointaine et joyeuse arrivait en effet comme un écho plein de moqueries.

André Maynotte ajouta :

« Cet homme ne se défendra plus. Il a joué son va-tout. Il a perdu. Il est mort. »

L’immobilité complète de Lecoq sembla ratifier cette sentence.

Les deux témoins, le magistrat et le fonctionnaire, étaient, dans toute la force du terme, subjugués par l’intérêt dé cette scène étrange. Le chef de division, homme timide et de milieu, cherchait une règle de conduite dans la contenance de M. Roland ; celui-ci, plus robuste d’intelligence et plus compromis aussi dans le passé, par l’énergie même de sa nature, subissait une sorte de fascination.

Il y avait dans ce que venait de dire André Maynotte des paroles contre lesquelles tous deux éprouvaient le besoin de protester. Nul n’a le droit, assurément, de se constituer juge, surtout en sa propre cause, et il n’y a pas dans nos mœurs, surtout pour deux hommes tels que M. Roland et M. Schwartz, d’autre tribunal que celui qui délibère en robe rouge ou noire sous le crucifix, en présence de tous ceux qui veulent entrer par les portes grandes ouvertes.