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Page:Féval - Les Habits noirs, 1863, Tome II.djvu/73

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loppa dans son manteau. La lune à son premier quartier descendait déjà derrière la montagne. C’était l’heure. André entra hardiment et dit au gardien de la porte :

« Fera-t-il jour demain, l’ami ?

— Tout comme hier, répondit l’autre, s’il plaît à Dieu. »

Puis il ajouta :

« Tu viens de bonne heure !

— C’est que le temps presse, » répliqua André qui passa.

L’instant d’après, il revenait portant dans ses bras Giovanna-Maria, qui avait un voile noué autour de la bouche.

Cette fois, le gardien faisait mine de dormir.

Une douce petite voix descendit des fenêtres comme ils passaient sous le pignon du château et leur cria :

« Bonne chance ! »

Fanchette ne dormait pas.

L’homme qui tenait les chevaux n’eut point de défiance. Giovanna se laissa mettre en selle en gémissant. Ils partirent au galop. On chantait toujours le refrain du vin dans la maison du Père.

Ce ne fut pas une nuit d’amour. Giovanna pleurait, poursuivie par l’image de sa mère. André, soumis et doux, respectait la douleur de sa bien-aimée. Au point du jour, il fallut entrer dans une hôtellerie, parce que Giovanna défaillait. Quand elle eut repris son courage et ses forces, les Reni couraient déjà le pays.

« On dut s’enfoncer dans le maquis, car les routes étaient sillonnées en tous sens. Toulonnais avait mis sur pied tous ceux qui obéissaient au Père. Les deux amants, blottis dans le fourré, entendirent plus d’une fois la chasse qui allait à droite, à gauche, par devant