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Page:Fabre - Chroniques, 1877.djvu/101

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Quelques parents, prévoyant que leurs enfants n’auront pas de prix, ont le soin de les retirer du collège avant la fin de l’année ; ce qui leur fournit l’occasion de dire à leurs amis et connaissances :

— Ce pauvre enfant ! il n’a pas eu de bonheur. Il comptait avoir tous les premiers prix de sa classe, mais il avait tant travaillé toute l’année qu’il en a fait une maladie. Il a fallu le ramener en toute hâte à la maison ; jugez de son désappointement ! Il était tombé dans une sombre mélancolie dont nous ne savions que faire pour le tirer. Il rêvait chaque nuit qu’on lui volait ses prix. C’était navrant.

Parfois, c’est l’écolier qui, bien avisé, tombe de lui-même malade et échappe ainsi aux humiliations de la défaite.

En général, l’écolier qui, durant tout son cours, se tient à l’arrière-garde, emploie aussi bien ses vacances qu’il a mal employé le temps de ses études. Il pille les économies de sa vieille tante et joue au cheval fondu avec ses camarades dans le salon de sa mère.

Le calme ne renaît dans la campagne qu’au mois de septembre, à la rentrée des classes. Les vacances des écoliers finies, les vacances des parents commencent.


La ville émigre à la campagne. En revanche les Américains commencent à venir. Braves gens qui partent d’Albany ou de Boston pour respirer l’air chaud de Québec ou de Montréal. Ils se promènent en plein midi, ils suent à grosses gouttes en montant à la Citadelle, ils étouffent dans les chambres d’hôtel ; n’importe, ils s’en retournent contents et croient s’être rafraîchis le teint. Ainsi va la comédie. Les habitants de Philadelphie quittent leur ville, parce que la chaleur y est intolérable pour aller respirer l’air frais à New-York, où il fait aussi chaud, et les habitants de New-York, toujours pour respirer le frais, vont à Philadelphie soutenir le poids des