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Page:Fabre - Chroniques, 1877.djvu/260

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louis. Son père lui avait laissé pour seul héritage une garde-robe complète de redingotes, qui l’ont mal habillé jusqu’à l’époque où Mme. Perret l’a définitivement émancipé du joug paternel.

C’est un excellent homme, fin en affaires, économe de l’argent des autres comme du sien, tenant avant tout à ce qu’on ne le mette pas dedans, ne souscrivant jamais trop, et faisant subir à ceux qui lui arrachent l’aumône un interrogatoire minutieux et sévère sur l’usage auquel ils la destinent. Il sait sur le bout de ses doigts la fortune d’un chacun, et tient en mémoire même des banqueroutes où il ne perd rien. Les gens dont il fait le moins de cas sont ceux qui n’ont pas de propriété. Il leur refuse le droit d’exprimer une opinion sur quoi que ce soit.

— M. X. n’a pas un morceau de terre à se mettre sous les pieds, dit-il.

Le premier conseil qu’il donne aux jeunes gens, c’est d’avoir pignon sur rue.

— Les jeunes gens ! les jeunes gens ! s’écrie-t-il brusquement, se marient aussitôt qu’ils se trouvent à la tête d’un revenu suffisant pour payer une dispense de banc et acheter une chaîne conjugale dont le premier anneau se met au doigt de la femme, tandis que le reste de la chaîne se met au cou du marié. Étonnez vous après cela, ajoute-t-il, qu’il y ait dans le monde tant d’étranglés !

Il avait, naturellement, un penchant particulier pour Blandy, qui lui paraissait un garçon en train d’arriver à la propriété.

Au milieu de toutes ces qualités cependant, s’épanouissait un défaut qui n’était pas sans laisser des inquiétudes au docteur. Perret déclarait à qui voulait l’entendre qu’il ne donnerait point de dot à ses filles, et qu’il obligerait ses garçons à gagner leur vie comme s’il n’avait rien à leur laisser.