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Page:Fabre - Les Auxiliaires (1890).djvu/174

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RÉCITS DE L’ONCLE PAUL

XXVIII

LE TROGLODYTE. — LE ROITELET

Paul. — Encore un architecte de haut talent, passé maître en construction de nids. C’est le troglodyte, la pétouse de la Provence, le roi bertaud ou robertot des provinces de l’Ouest. Si vous me demandez ce que signifie le nom assez étrange de troglodyte, je vous répondrai que c’est un mot grec qui veut dire habitant des trous. Quelque nomenclateur, plus ami du grec que désireux de se faire comprendre, a cru bien faire en donnant ce nom au petit oiseau qui furette dans les trous à la manière des souris. Ma description sera peut-être mieux comprise. Le troglodyte est une bouffée de plumes couleur de bécasse, qui, l’aile pendante, le bec au vent, la queue relevée sur le croupion, toujours frétille, sautille et babille : tiderit, tirit, tirit.

Jules. — Je le connais, cet oiseau guère plus gros qu’une noix. Il rôde, chaque hiver, autour de la maison ; il circule dans les tas de fagots ; il visite les trous de murs ; il pénètre au plus épais des buissons. De loin on le prendrait pour un hardi petit rat.

Paul. — C’est bien lui, c’est le troglodyte. Dans la belle saison, il habite les bois touffus. Là, sous l’arcade de quelque grosse racine à fleur de terre et couverte d’une épaisse toison de mousse, il se construit un nid imité de celui de la penduline. Les matériaux sont des brins de mousse, pour que l’édifice se confonde d’aspect avec le support. Il les assemble en grosse boule creuse, percée sur le côté d’une ouverture très étroite. L’intérieur est garni de plumes. D’autres fois il choisit pour emplacement un toit de chaume, une pile de fagots, une épaisse fouillée de lierre, une cavité naturelle sur la berge d’un ruisseau ombreux. La ponte est d’une dizaine d’œufs blancs, pointillés de rougeâtre au gros bout.

Les froids venus, il quitte les forêts pour se rapprocher des fermes. On le voit alors, sans cesse remuant et affairé, entrer dans les noirs passages des piles de bois, des vieilles murailles, des arbres morts et des buissons touffus, pour inspecter coins et recoins et donner la chasse à toute espèce de vermine qui prend ses quartiers d’hiver dans les gerçures des écorces