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Page:Faucher de Saint-Maurice - Promenades dans le golfe Saint-Laurent, 1886.djvu/31

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LE GOLFE SAINT-LAURENT.

d’une distinction spéciale. Sir Hovenden Walker voulut bien trinquer avec leurs sachems ; et les chefs pour ne pas rester en arrière de courtoisie portèrent un toast à Sa Majesté, en disant à l’amiral :

— Depuis longtemps nous nous attendions à contempler les merveilles que nous voyons maintenant. Nous sommes dans la joie en songeant que la Reine a pris un tel soin de nous ; car, nous commencions à désespérer. Maintenant nous ferons tout en notre possible, et nous espérons que dorénavant les Français seront vaincus en Amérique.

Ces raouts et ces collations fines se succédèrent ainsi à la file, qui à bord de l’escadre, qui chez le gouverneur, qui chez les officiers supérieurs de la colonie, jusqu’au moment où il fallut parler d’affaires sérieuses.

Il s’agissait maintenant de trouver et d’embarquer en toute hâte quatre mois de provisions, pour 9385 soldats et matelots destinés à l’expédition navale contre la Nouvelle-France.

Un seul homme dans Boston pouvait fournir une aussi importante commande. C’était le capitaine Belcher, négociant riche et rusé, qui en peu de temps avait su se rendre maître du marché de la Nouvelle-Angleterre, et le contrôlait à sa guise. Tout en prêtant l’oreille aux propositions de l’amiral, et en gagnant du temps par des promesses, Belcher réussit à accaparer le sel disponible, et prit à sa solde tous les boulangers de la ville : si bien que, le jour venu pour exécuter son contrat, il se trouva en mesure de faire ses conditions lui-même et d’exiger de l’argent comptant. Les bouchers se mirent de la partie ; ils ne voulaient livrer leur viande que contre espèces sonnantes.