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Page:Faure - Histoire de l’art. L’Art médiéval, 1921.djvu/24

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eux précisément au cours d’un siècle, le XVe, où la foi catholique connut sa minute de fièvre et de surexcitation la plus ardente. Nous ne nous sommes jamais demandé pourquoi l’Inde confondit ses dieux contradictoires dans la même explosion d’ivresse sensuelle, pourquoi l’Islam qui a conservé de nos jours l’intransigeance fanatique d’il y a dix siècles, laisse ses mosquées tomber en ruines et n’en bâtit pas d’autres, pourquoi l’artiste chinois appartient quelquefois à trois ou quatre sectes différentes tandis que l’artiste japonais donne presque toujours l’impression de n’appartenir à aucune, pourquoi l’Européen élevait des autels à un dieu de miséricorde à l’heure où l’Aztèque faisait ruisseler sur les siens le sang des victimes humaines. Nous ne nous sommes jamais demandé si les peuples ne donnaient pas à leurs croyances la forme de leurs sensations.

Il faut bien, cependant, que nous ayons de la création artistique à nos heures de virilité, un besoin aussi impérieux que de la nourriture et de l’amour, et entraînant dans son mouvement triomphal nos croyances, puisque les peuples même auxquels les théologiens et les philosophes enseignent le néant final de l’effort créent, puisque leurs poètes chantent, en termes créateurs de vie, la vanité de notre action. Le christianisme est pessimiste, l’islamisme est pessimiste, le panthéisme est pessimiste, qu’importe ! Le chrétien fait bondir hors du sol une forêt sonore de voûtes, de vitres et de tours, le musulman étend l’ombre fraîche de ses coupoles sur son incurable inertie, l’Indien éventre les montagnes pour les féconder. L’homme veut vivre et demande à ceux qui chantent et qui sculptent de lui montrer les voies de la vraie vie, même quand ils lui parlent de la mort. Quels que soient les dieux qu’adore un peuple, ce peuple les fait ce qu’il est.

Sans doute, il nous faut une foi. C’est seulement en elle que nous puisons la force nécessaire pour résister à nos désillusions et maintenir devant nos yeux l’image de notre espérance. Mais cette foi que nous ornons d’étiquettes nouvelles quand une métaphysique ou une morale nouvelle s’impose à nos