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Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 6.djvu/198

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pièce. Notre dessin représente la pièce au moment où l’obus vient d’être introduit dans la culasse ouverte.

La commission d’expériences de Calais a essayé un mortier rayé, de 270 millimètres. Voici quelques renseignements sur ce canon :

Longueur totale de la bouche à feu 
3m,200
Longueur de la partie frettée 
2m,500
Nombre des rayures 
80
Longueur de la partie rayée 
2m,242
Épaisseur de la pièce 
45 millim.
Poids de la pièce 
5 750 kilos.
Poids du projectile 
170 kilos.
Poids de la charge 
8 kilos.
Portée de la pièce 
5 200 mèt.

Les mortiers lisses, dont nous avons parlé dans les Merveilles de la science[1], ont été maintenus pour la guerre de siège et l’armement des places fortes. Ils sont susceptibles de rendre encore des services pour le tir plongeant à courtes distances.

L’artillerie belge a expérimenté tout récemment, au polygone de Brosschaet, un mortier rayé de 9 centimètres, fabriqué en acier de Seraing, d’après un tracé établi à la fonderie de canons. Ce mortier, analogue au mortier Krupp de même calibre, a une portée de 3 500 mètres.

C’est le cas de remarquer qu’on en est revenu de nos jours aux grandes subdivisions de l’artillerie à âme lisse, c’est-à-dire qu’après avoir admis pendant quelques années que le tir tendu des premiers canons rayés, ainsi que leur tir courbe, suffisaient à toutes les exigences d’un siège, on a dû fabriquer à nouveau des obusiers et des mortiers rayés. Avec cette division très naturelle le mortier joue désormais un rôle nettement défini, qui consiste à lancer des bombes et des obus à balles, et l’on est conduit à se demander s’il est urgent de construire des mortiers énormes tirant à des distances où les anciens mortiers lisses n’ont jamais eu la prétention d’atteindre.

À l’étranger, ces idées ont prévalu. Le mortier autrichien ne pèse que 80 kilogrammes, le mortier italien 100 kilogrammes, le mortier russe 90 kilogrammes.

L’affût du mortier autrichien est, pour les déplacements, muni d’un essieu et de deux roues en bois. On le transforme en brouette, à l’aide de deux bras de limonière, et rien n’est alors plus facile que de le promener tout le long d’une tranchée, et même d’une tranchée à une autre. À 1 500 mètres, on emploie ce mortier pour atteindre, au moyen d’obus ou de shrapnels (obus à balles) les troupes et les servants des pièces derrière les épaulements. Avec une charge de 50 grammes, le projectile est envoyé à 400 mètres et l’écart probable, en direction, ne dépasse pas un mètre. Avec une charge de 140 grammes, la bombe va jusqu’à 1 150 mètres et l’écart probable, en direction, n’est que de 2 mètres ; c’est-à-dire que le tir est presque rigoureusement précis.

L’artillerie espagnole possède un mortier rayé de 15 centimètres, qui, monté sur son affût, repose sur une plate-forme pourvue de roues. On transporte à la fois la pièce, l’affût et la plate-forme, le tout rattaché à un avant-train de campagne. Cet avant-train contient 12 projectiles, et le poids total de cet étrange véhicule n’est pas sensiblement supérieur au poids d’un canon de campagne.

L’artillerie belge a suivi cet exemple ; elle est en train de construire un mortier monté sur plate-forme, avec deux roues en fer du type Arbel ; le roulage n’aurait lieu que du parc ou des magasins jusqu’à l’emplacement de batterie. L’affût est brêlé sur la plate-forme, pendant le transport. L’avant-train renferme vingt projectiles, les charges et les accessoires de la bouche à feu.

C’est dans cette voie certainement que s’engagera l’artillerie française. Les mortiers de très grandes dimensions sont d’un emploi difficile ; il est curieux de les expéri-

  1. Tome III, page 399.