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Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 6.djvu/214

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pitaine. Pendant la guerre de 1870, l’armée allemande n’a jamais attaqué l’armée française sans que l’assaut de l’infanterie eût été préparé et facilité par un tir prolongé de l’artillerie. Il n’y eut qu’une seule exception à cette règle prudente : à Saint-Privat, le 16 août, la garde prussienne s’aventura, sans attendre l’intervention préalable de l’artillerie. Il lui en coûta cher, d’ailleurs, et la plaine de Saint-Privat a mérité d’être appelée par les écrivains allemands « le tombeau de la garde prussienne ».

Rien n’est plus facile, au surplus, si l’on a lu avec attention les ouvrages des écrivains spéciaux et les règlements allemands et français sur le service de l’artillerie en campagne, que de faire la description d’une bataille future.

Dès que le général en chef a reconnu la position de l’ennemi, et qu’il a pris la résolution d’attaquer, il déploie sa réserve d’artillerie. On est à cinq ou six kilomètres de distance. Chaque capitaine va reconnaître un emplacement convenable, et choisit de préférence une crête. Il fait signe à son lieutenant en premier ; les pièces sont à la file. Au commandement du lieutenant en premier, la tête de colonne part, au trot. On débouche sur le terrain ; le lieutenant commande : Sur la droite en batterie, au galop, marche ! La première pièce fait à droite, les autres continuent droit devant elles, et font successivement le même mouvement. En moins de deux minutes, elles sont alignées les unes à côté des autres. Il ne faut qu’une demi-minute pour charger la pièce, pour pointer et pour mettre le feu à la charge. L’obus part ; l’artillerie ennemie riposte ; et c’est alors à qui tirera, tout à la fois, avec le plus de précision et de rapidité. En thèse générale, quand le tir de l’artillerie est réglé, nulle troupe ne peut rester exposée à son feu.

Au surplus, la réserve d’artillerie est bientôt puissamment secondée. Les deux divisions du corps d’armée prennent position, débouchent sur le terrain, et chacune d’elles amène quatre autres batteries, qui joignent leurs efforts à ceux de l’artillerie de réserve. Il faut, d’abord, éteindre le feu de l’artillerie opposée, puis, détruire les obstacles qui arrêteraient la marche en avant de l’infanterie, et qui briseraient son élan. Cela fait, l’artillerie se tait pendant un instant ; l’infanterie entre en ligne ; mais, quand la victoire est assurée et que l’adversaire bat en retraite, l’artillerie couvre de projectiles les troupes déjà débandées, et elle réussit presque toujours à transformer leur défaite en déroute.

Ces courtes considérations suffisent pour expliquer l’organisation actuelle de l’artillerie française, et sa répartition en artillerie divisionnaire, et artillerie de corps, ou de réserve.

Chaque batterie montée comprend 18 voitures, six pièces de canon, neuf caissons, une forge, un chariot de batterie et un chariot-fourragère. Les batteries à cheval attellent les mêmes voitures ; seulement, les batteries à cheval emmènent, en outre, 4 fourgons de vivres et 2 fourgons de bagages, tandis que les batteries montées n’ont que 3 fourgons de vivres.

Nous décrirons plus loin les pièces et les caissons de munitions. Disons, dès à présent, et pour n’y plus revenir, que le chariot de batterie sert au transport du harnachement, des outils et des pièces de rechange, la forge aux réparations usuelles et au ferrage des chevaux, et le chariot-fourragère, comme son nom l’indique, au transport des fourrages.

Un autre chariot, attelé de quatre chevaux, renferme la boulangerie (fig. 186, page 212).

Il est inutile d’insister sur l’utilité de ces accessoires. Que de fois une batterie ne campe-t-elle pas loin de tout village, non