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Page:Flammarion - La Pluralité des mondes habités, Didier, 1877.djvu/22

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INTRODUCTION.

de vertige et tombe, évanouie, dans les bras du Scepticisme.

Œuvre de destruction ! Il y a cette année un siècle, que faisiez-vous, philosophes modernes ! Rousseau, écrivant l’Émile, écoutait les premiers craquements de la révolution prochaine ; d’Alembert rayait le mot croyance du dictionnaire ; Diderot parodiait la société avec son ami le Neveu de Rameau ; Voltaire (pardonnez-nous l’expression) tapait, sur l’épaule de Jésus en lui donnant son congé ; les abbés-cardinaux rimaient pour leurs maîtresses des madrigaux fleuris ; le roi s’occupait de broderies d’alcôve… Voilà ceux qui menaient le monde. Après nous le déluge, disaient-ils. Il vint, en effet, ce déluge de sang qui engloutit le monde de nos pères ; mais nous n’avons point encore vu dans le ciel la colombe rapportant dans son bec le rameau vert d’un monde renaissant.

Le passé est mort ; la philosophie de l’avenir n’est pas née : elle est encore enveloppée dans les troubles laborieux de l’enfantement. L’âme du monde moderne est divisée et en contradiction perpétuelle avec elle-même. Réflexion grave, la science, cette divinité puissante du jour, qui tient en main les rênes du progrès, la science n’a jamais été aussi peu philosophique, aussi isolée qu’aujourd’hui. Nous avons ; ici présents, à la tête des sciences, des hommes qui nient arbitrairement l’existence de Dieu et qui éliminent par système la première des vérités. Nous en avons d’autres, dont l’autorité n’est pas moindre, qui n’admettent pas l’existence de l’âme et qui ne connaissent rien en. dehors du travail des combinaisons chimiques. Voici une pléiade qui proclame ouvertement la question de l’immortalité une question puérile, bonne tout au plus au loisir des gens inoccupés. En voici