Aller au contenu

Page:Fleuret - Histoire de la bienheureuse Raton, fille de joie, 1931.djvu/123

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Raton n’osait se lever pour se saisir de la robe, mais l’innocente convoitise, la religieuse coquetterie, si l’on peut dire, qui brillait dans ses yeux en disait assez.

« Enfin, pensait-elle, je vais, grâce à M. Peixotte, qui révère la sainte Religion, pouvoir me contempler avant le temps dans la robe des fiancées du Christ. » Et elle ne détournait ses regards que pour les jeter sur les glaces qui la réfléchiraient dans sa robe conventuelle.

— Mets-la donc, mon enfant, dit enfin le financier. Après, tu prendras ce manteau de bure blanche du plus bel effet. Mais il faut enlever tes vêtements, sans quoi tu ne serais pas une véritable Carmélite, et la robe s’ajusterait mal, encore qu’elle ait beaucoup d’ampleur.

Pendant que Raton se déshabillait, Peixotte, enfoncé dans les coussins, la regardait faire. Ses doigts, qui ne pouvaient tenir en repos, échangeaient leurs bagues d’une main à l’autre. Ses pieds croisés, dont la petitesse le rendait fat, témoignaient par leur agitation de la vivacité des sentiments que lui causaient les charmes à demi dévoilés de la belle fille. Il jouissait de sa confusion quand un sein rebelle sortait de la chemise où l’y réintégrait une vaine sollicitude.

Raton passa la robe, la guimpe et le scapulaire. Elle se mit devant une glace pour accommoder le voile sur sa guimpe. Le bonheur rayonnait sur son visage, et sans