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Page:Fleuret - Histoire de la bienheureuse Raton, fille de joie, 1931.djvu/124

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doute sa vision fût-elle apparue sans la présence de M. Peixotte. M. Peixotte, lui, pouvait observer de son divan les mines que s’adressait Raton en refoulant parfois quelques mèches indociles qui bouffaient contre ses tempes, maladroitement dissimulées. Tantôt, contenant un cœur blessé d’amour, la tête rejetée en arrière et le corps supporté par une jambe vacillante, elle semblait frappée comme Thérèse du javelot de l’archange ; tantôt, joignant les mains et baissant les yeux, elle copiait l’attitude de Maria-Magdalena Pasini sur la tabatière de Monseigneur, et elle n’apercevait son reflet qu’en coulant un regard entre ses cils. Elle songeait alors à M. de Bernis, aux seules caresses qui eussent ému sa chair. Pourquoi, lui aussi, ne conservait-il pas dans une armoire un costume de religieuse ? Elle aurait pu le mettre et lui rappeler davantage les deux belles nonnes de San Giacomo. À l’image de Maria-Magdalena, elle semblait rêver sur un souvenir voluptueux. Et M. Peixotte en fut fort troublé. Sans doute, reprit Raton en elle-même, M. Peixotte a-t-il aimé quelque jeune fille que ses parents ont poussée au cloître et lui plaît-il de se la représenter. Ce n’est point pour d’autres raisons qu’il possède cette robe ; peut-être même va-t-il sortir de sa poche une boîte enrichie de brillants et décorée de miniatures.

Enfin, Raton se tourna vers le financier avec une