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Page:Fleuret - Histoire de la bienheureuse Raton, fille de joie, 1931.djvu/189

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cela, l’Abbé, afin de nous distraire et me mettre en garde. Mes chéries, laissez la Belle un peu tranquille, et veuillez vous taire un instant. Ma parole ! elles l’ont presque dévêtue !…

L’abbé huma une prise et parla en contemplant tantôt la pointe de ses vieux souliers, tantôt les Amours qui folâtraient au plafond, pour ne pas voir les beaux seins de Raton et son buste gracieux qui s’érigeaient tout nus hors des paniers bouffants. Il aurait vu, du même coup, sa rougeur qui s’étendait jusqu’aux épaules, et sans doute se serait-il reproché de l’avoir fait naître.

Mais Raton ne rougissait qu’au souvenir de M. Peixotte. Elle se demandait quel autre sacrilège le financier avait pu commettre. Puis elle trembla qu’il ne fût retombé avec elle dans sa première faute. Elle écouta donc, les paupières baissées, tandis que deux de ces demoiselles lui essayaient des mouches sur les tempes, au coin de l’œil, au coin de la bouche, et la pressaient tendrement, ne se lassant de s’étonner de la douceur de sa peau, et surtout de la fragrance qui s’en exhalait, cette suave odeur de sainteté qu’au dire de Thomas A. Kempis l’on prenait plaisir à humer sur la gorge dévastée de Liduine, soit que Notre-Seigneur l’eût visitée, soit que quelque vision l’eût transportée au Ciel.