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Page:Fleuret - Histoire de la bienheureuse Raton, fille de joie, 1931.djvu/231

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y voyait Raton peinte à la détrempe, ses longs cheveux de Madeleine répandus comme un chaste voile sur les épaules et la poitrine, mais laissant toutefois paraître une rose de carmin, pareille à une fleur dans les blés. Les mains étaient jointes, le regard tourné vers le Ciel, seule allusion que la Gourdan crût pouvoir se permettre sans manquer à ses engagements. Quant au portrait moral, il tenait en ces mots, dont les premiers expliquaient assez la figure : Amour mystique. Parfum naturellement enchanteur. Au-dessous, l’on aurait pu lire le nom frivole de Raton : il eût fait présager une agréable vivacité dans les transports. Mais on sait que la coutume n’était point de dévoiler les noms véritables, dont quelques-uns sentent leur peuple, et dont la plupart risquent de rappeler fâcheusement les épouses que l’on trompe ou les sœurs que l’on révère. Cependant, sous l’effigie de Raton ne se lisait rien. C’était là que la Gourdan triomphait.

— Qu’elle est belle ! s’écriait-on.

— Elle est si belle que Belle est son surnom ! répliquait la Mère avec avantage. Et comme chacun l’articule de son propre chef sans en être instruit, j’ai pensé qu’il était superflu de l’écrire comme on l’a fait pour les autres.

Il n’était pas encore advenu, devant ce visage de sainte, que des amateurs eussent senti s’éveiller en eux